Le 15 octobre 1877, je sortais de la maison que j’habite, 35, rue de Seine.
Neuf heures sonnaient à ma pendule lorsque je pris ma canne et mon chapeau ; je me hâtai, descendis vivement l’escalier, puis gagnai le quai, car des affaires pressantes m’appelaient de l’autre côté des ponts. C’était un jeudi.
Justement, c’était un beau jour ; le ciel était bleu et la lumière douce ; les feuilles tardives et tendres qui viennent en automne aux arbres de Paris donnaient au quai un air de printemps. Je fredonnais, je crois, en sortant de la voûte qui passe sous l’Institut ; gagnant le parapet du quai, je me laissai caresser par une brise tiède, tout en feuilletant quelque vieux livre, témoin du passé,
sicut meus est mos !
Quelque temps avait dû s’écouler, car ma rêverie et ma lecture vagabondes s’étaient prolongées. Il me sembla sortir d’un rêve et, relevant la tête, je la tournai d’instinct vers la grave coupole pour voir à l’horloge s’il me fallait me hâter, et combien j’avais perdu de temps.
Il était neuf heures moins un quart.
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(Henry COCHIN, Le Manuscrit de monsieur C.A.L. Larsonnier, 1881)

