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LES FÉES PHOTOGRAPHIÉES

 

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(De notre correspondant particulier.)

 
 

Londres, 11 mars.

 
 

Une certaine émotion a été causée dans l’opinion anglaise, il y a quelques mois, par la nouvelle que les fées, ces êtres charmants que l’on considérait jusqu’ici comme des créatures de l’imagination des individus et des peuples, mais dont personne n’aurait osé affirmer positivement l’existence, avaient été photographiées.

Dans un article qui fit grand bruit, un auteur bien connu, sir Arthur Conan Doyle, le créateur de Sherlock Holmes, qui a depuis un certain temps abandonné la littérature pour s’adonner aux recherches psychiques, exposa dans le Strand Magazine les faits étonnants qui, suivant lui, constituent une des plus importantes découvertes des temps modernes ; il publia à l’appui de sa thèse deux photographies des plus intéressantes. Les esprits positifs, qui abondent en Angleterre, ayant révoqué eu doute l’authenticité de ces photographies, sir Arthur Conan Doyle vient d’en publier, dans le même magazine, deux autres qui paraissent plus étonnantes encore.
 
 
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De ces quatre photographies, les deux premières ont été prises dans l’été de 1917, les deux dernières l’été dernier, dans un ravissant vallon du comte de Yorkshire, ombragé et arrosé d’un ruisseau qui descend en cascades entre des rives couvertes de hautes herbes et de fleurs sauvages. Elles représentent avec une précision extraordinaire des fées et (dans un cas) un gnome, sautillant ou dansant autour d’une jeune fille, dans le costume et avec les attributs qu’une tradition immémoriale accorde à ces êtres. Le gnome est habillé en couleurs ternes, avec un petit bonnet à plume ; les fées, en rose clair ou mauve, et, comme le gnome, sont munies de larges ailes ressemblant à celles des papillons. Il faut en excepter une, des fées photographiées dans un groupe dansant, et qui semble marcher dans l’herbe, tandis que ses compagnes voltigent à plusieurs centimètres au-dessus du sol.
 
 

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Je sais bien – et sir Arthur le savait aussi – que l’on criera au truquage. Les progrès de la photographie permettent aujourd’hui de produire les effets les plus extraordinaires. Mais, en admettant qu’un investigateur aussi curieux et attentif se soit laissé tromper, on ne s’expliquera pas facilement que tous les photographes à qui l’on a soumis les plaques et les épreuves où apparaissent ces petits êtres aient été incapables de découvrir la fraude, et que quelques-uns aient déclaré que l’on se trouve, sans l’ombre d’un doute, en présence de vues qui n’ont subi aucune retouche.
 
 
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Mais pourquoi, dira-t-on, un si long intervalle s’est-il écoulé entre les deux premières photographies et les deux secondes? C’est que les deux jeunes filles qui ont pris les deux premières – elles avaient alors l’une seize ans, l’autre dix – et qui sont cousines, déclarent ne pouvoir prendre de telles photographies que lorsqu’elles sont ensemble dans le vallon des fées, l’une maniant l’appareil photographique, l’autre posant avec les petites apparitions, qui, paraît-il, leur sont très familières. Or, elles ne se sont retrouvées ensemble que l’été dernier, et, leurs deux premières photographies ayant fait quelque bruit dès le printemps dernier dans les milieux qui s’occupent du surnaturel, elles ont repris leurs expériences et réussi à fixer de nouvelles images de leurs petites amies les fées.
 
 
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Un détail de ces expériences singulières retiendra l’attention : c’est que, dans chaque cas, il semble nécessaire qu’une créature humaine, bien vivante et bien réelle, figure dans le tableau. Il en est de même, je crois, de ces photographies prises par des médiums et qui représentent, à côté d’une figure vivante, les traits vaguement lumineux d’un ou de plusieurs « esprits. » On ne voit pas clairement pourquoi, si ces deux jeunes filles du Yorkshire peuvent, comme elles le disent, voir et entendre les chœurs des fées dansant dans de beaux après-midi d’été, il ne leur serait pas possible de les photographier isolément, comme un entomologiste photographie des papillons voltigeant sur des fleurs.
 
 

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On s’est demandé s’il ne s’agirait pas là de « photographies de la pensée, » c’est-à-dire de formes conçues si vivement, avec une telle intensité, qu’elles en arrivent à s’extérioriser et à paraître réelles. Mais comment s’expliquer qu’elles s’enregistrent sur la matière sensible d’une plaque photographique ? La taille des fées et du gnome photographiés jusqu’ici sont à peu près uniformes, une trentaine de centimètres. La beauté et l’agilité des fées sont remarquables, et leur mouvement a même affecté les plaques, bien que la pose n’ait été que d’un cinquantième de seconde. Une enquête approfondie sur les circonstances dans lesquelles ces vues ont été prises a été faite l’été dernier par M. E. L. Gardner, de Harlesden, près de Londres, qui a porté ces faits à l’attention de sir Arthur Conan Doyle, et l’un et l’autre se tiennent assurés que l’on n’a pas surpris leur bonne foi. Malgré tout, malgré cette évidence photographique, qui est, comme nous l’avons dit, très sujette à caution, on ne peut s’empêcher d’éprouver une certaine méfiance, surtout quand on a affaire à un maître des fictions vraisemblables, tel que le créateur de l’illustre « Sherlock Holmes. » Est-ce faire injure à sa sincérité de rendre hommage à son talent ? J’en ai bien peur : sir Arthur Conan Doyle, quand il traite de l’Au-delà, du spiritisme et de féeries, est convaincu qu’il est dans le domaine du réel. Sans doute, on pourrait faire bien des objections à sa théorie de l’existence réelle, visible, photographique des fées : comment, par exemple, les charmantes petites personnes, si substantielles, enregistrées sur ces clichés peuvent-elles être portées dans les airs par des ailes aussi insuffisantes ? Pourquoi ont-elles plus ou moins notre costume, les coiffures les plus modernes, la couleur des gens de notre race ? Et, s’il y a des fées également en Afrique ou en Chine, ont-elles des types ethniques empruntés aux régions qu’elles habitent ?…
 
 
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Les explications fournies jusqu’ici par sir Arthur ne m’ont chiffonné qu’en un point : c’est lorsqu’il a voulu démontrer que les fées sont des lépidoptères, qui passent par l’état de larve et de chrysalide. J’avoue que cette note scientifique paraît détonner singulièrement dans la démonstration de ces aimables existences auxquelles notre imagination a cru, mais que notre raison prosaïque rejette encore.
 
 

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(Octave Duplessis, in Le Figaro, soixante-septième année, 3ème série, n° 72, dimanche 13 mars 1921)

 
 

 
 

LES FÉES ET LES ANGES

 

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Au cours de l’été de 1917, deux jeunes Anglaises, Elsie Wright, alors âgée de 16 ans, et sa cousine Frances Ealing, qui ne comptait que dix printemps, avaient coutume de passer la journée dans un étroit vallon du Yorkshire, à Cottingley, près de Bingley. Là, coule un minuscule affluent de l’Aire. Le site est paisible et romantique. On faisait la dînette, on cueillait des fleurs, l’on rêvait, le dos dans l’herbe, ou l’on se racontait des histoires. Ces vacances eussent été d’une douce et reposante banalité sans l’intervention des fées. Ceci n’est pas un conte d’Andersen, mais une réalité d’allure scientifique qui a révolutionné le monde théosophique anglais.
 
 
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Les fées qui habitaient le vallon solitaire de Cottingley apparurent aux deux petites intruses, d’âme sans doute assez pure pour être admises à cet bonheur. Par groupes, elles venaient danser autour d’elles. Elles n’arrivaient point dans une citrouille transformée en carrosse traîné par des écureuils, elles n’avaient point en main de sceptre ni de bâton magique, point de couronne sur leurs cheveux d’or ; c’étaient de diaphanes petites personnes, presque immatérielles, muettes, mais agiles comme des libellules et qui semblaient émaner des fleurs. Un samedi après-midi, comme il faisait un soleil éclatant, Elsie emprunta l’appareil photographique de son père et s’en fut avec Frances dans le vallon. Une heure plus tard, elles revenaient et demandaient à M. Wright de développer un cliché. Les deux fillettes voulurent entrer dans le cabinet noir pour assister à l’opération. Penchées sur la cuvette du révélateur, elles suivaient avec une exaltation un peu inattendue l’apparition des noirs sur la plaque laiteuse. Tout à coup Elsie s’écria : « Les voilà ! les voilà ! nous les avons ! » L’appareil photographique de M. Wright avait, pour la première fois dans l’histoire du monde, « snapé » des fées. Sur le cliché, elles apparaissaient, dansant une ronde aérienne devant la petite Frances assise dans l’herbe.
 
 
Alice and the Fairies, July 1917.
 

Quelques épreuves de ce cliché sensationnel circulèrent parmi les intimes de la famille Wright. Après plusieurs années, l’une d’entre elles tomba entre les mains de M. E.-L. Gardner, membre du comité exécutif de la Société théosophique de Londres. Celui-ci, enthousiasmé mais prudent, partit pour Cottingley aux fins d’enquête. Elsie Wright avait grandi ; elle était maintenant employée dans la fabrique de cartes de Noël de M. Sharpe à Bradford, mais ses relations avec les fées, durant les beaux jours de l’été, n’avaient pas cessé. M. Gardner mit entre ses mains un appareil à objectif extra-lumineux, garni, par la maison Illingworth, de plaques ultra-sensibles préalablement marquées de signes distinctifs pour éviter toute fraude. Elsie et Frances repartirent pour leur vallon enchanté. Trois nouveaux clichés purent être pris. Sur l’un, l’on voyait Frances contemplant une fée toute proche de son visage ; sur l’autre, les fées paraissant sortir d’un buisson ; sur le troisième, on apercevait une fée émergeant, d’une sorte de cocon et commençant de déployer ses ailes. Le doute n’était plus permis. Un appareil mécanique, peu suspect d’imagination, avait apporté la preuve de l’existence des fées, chantées par les poètes et évoquées par les nourrices bienveillantes. S’il faut en croire M. Gardner et les théosophes, les fées ne jouent pas les rôles d’une magie tantôt charmante et tantôt sévère, qu’on leur prête habituellement. Elles sont des éléments de la vie végétale. Encore au premier stade de l’évolution spirituelle, pas plus intelligentes qu’un terre-neuve (sic), elles sont uniquement chargées des fleurs dont elles surveillent les épanouissements, malaxant les molécules colorées, donnant aux pétales, d’un invisible coup d’ailes, leurs plis harmonieux. Les fées ont un corps astral, normalement translucide, mais reflétant, sous un certain angle d’éclairage, les rayons ultra-violets, et qui a permis les heureuses photographies d’EIsie Wright. Leur vitalité est intimement liée à celle du soleil, dont elles prennent des bains. Elles ne sont visibles qu’à ces heures de pleine lumière. La matière astrale dont est faite leur corps est malléable à la pensée. On les voit donc comme on les imagine, ce qui est un assez joli symbole de l’amour qui sait parer une femme laide de toutes les grâces que lui prête son amant. Mais cette théorie cadre difficilement avec l’impartialité probable – sait-on jamais le secret de l’âme des choses chères au poète Charles Fuster ? – des kodaks de MM. Wright et Gardner. Les appareils photographiques ont-ils leur personnalité ? Cela expliquerait certains clichés où de jolis modèles sont péniblement enlaidis ; ce dont se désolaient les opérateurs. L’appareil, sans doute misogyne, les voyait ainsi, avec un parti-pris bien humain. Ou Elsie transmettait-elle sa vision personnelle à l’objectif anastigmat, esclave obéissant ?
 
 
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La science des jardiniers a-t-elle progressivement dérobé, par le jeu des engrais, des cultures en serre chaude, des croisements d’espèce, le secret des fées qui, découragées, disparaissent ? Celles de Cottingley sont-elles les derniers spécimens de ces humbles servantes de la divinité aux premiers âges du monde, comme il y avait, et il y a peut-être encore, dans le Centre africain ou en Australie des animaux – l’opaki par exemple – dont la race s’est éteinte ? On peut se plaire à imaginer que le créateur, en attendant que l’homme eût atteint le plein développement de son intelligence qui devait lui permettre de domestiquer les éléments (électricité, vapeur, phonographe, T. S. F., etc.), l’avait entouré de mystérieux petits collaborateurs et collaboratrices, gnomes, farfadets, fées, qui facilitaient sa besogne. Leur mission devenant inutile, ils sont rentrés non dans le néant qui n’a pas de raison d’être, mais dans la réserve des forces autrement utilisables. Ils ont peut-être été grossir la phalange des anges ?

Ceux-ci, en effet, s’il faut en croire M. Geoffrey Hodson, autre théosophe, sont tout aussi perceptibles à l’homme que les fées le furent à Elsie Wright et Frances Ealing. Il vient de publier à leur sujet un ravissant petit ouvrage, The Brotherhood of Angels and of Men (La Fraternité des anges et des hommes), édité par la Société théosophique, 38, Great Ormond street, London, W. C. I.

Dans sa préface, Mme Annie Besant déclare qu’il ne faut point considérer les anges sous leur forme traditionnelle de l’art chrétien : les grandes draperies à la grecque et les ailes gracieuses. Les anges, autrement appelés « esprits de la nature, » « devas, » « élémentaires, » s’apparentent aux fées qui ne seraient que des anges au premier degré de leur évolution. Notre terminologie est impuissante à marquer ces degrés raffinés dans la hiérarchie des esprits au milieu desquels nous vivons. Si, pour MM. Gardner et Sinnet, vice-présidents de la Société théosophique de Londres, les fées sont étroitement liées au règne végétal, le règne minéral possède pareillement les gnomes (J’ai oublié de dire que miss Elsie Wright a réussi à en photographier un). Mme Annie Besant admet ces gnomes et nous révèle qu’ils sont nombreux, particulièrement en Hongrie. Mais revenons aux anges. Je ne me chargerai pas d’exposer de façon tout à fait orthodoxe la théorie de M. Geoffrey Hodson et les étapes par lesquelles, en suivant le fleuve de Vérité, on arrive au pont qui sépare le pays de la pensée du pays de la paix, provinces des mondes réels et irréels dont le premier n’a point de formes alors que le second en possède d’évidemment fallacieuses. Le pathos poétique et philosophique, en une telle matière, déjà tout résumé. Qu’on sache seulement que les anges et les hommes, deux branches de l’infinie famille divine, doivent coopérer pour l’amélioration finale de la race humaine, but suprême de la création. Il y aurait sept catégories d’anges (le chiffre fatidique 7, cher à Pythagore ne perd pas de sa valeur) ainsi réparties :
 

Les anges de la force ;

Les anges de la guérison ;

Les anges gardiens du foyer ;

Les anges constructeurs ;

Les anges de la nature ;

Les anges de la musique ;

Les anges de la beauté et de l’art.
 

Les premiers enseignent aux hommes à libérer les énergies spirituelles latentes en eux. Ils sont attirés par les cérémonies religieuses.

Les seconds ont pour chef l’archange Raphaël. Leur présence au chevet de ceux qui souffrent est certaine, malgré l’hostilité de ceux qui ont la charge des malades (ceci est un coup de patte aux médecins libre-penseurs).

Les anges du foyer sont trop connus pour avoir besoin d’être présentés davantage.

Les anges constructeurs président aux naissances.

Les anges de la nature sont innombrables : elfes, fées, ondines, sylphes, etc. Nous revenons au vallon de Cottingley.

Les anges de la musique ont des trompettes, des flûtes, et scandent de battements d’ailes leur divine chanson.

Les anges de la beauté et de l’art ont une tâche immense. « Invoquez-les, dit M. Hodson, dans vos écoles d’art, appelez-les à votre aide. La laideur sera bannie et le monde sera plus beau. »

(À considérer les productions de nos jeunes musiciens et de nos peintres avancés, il est certain que les conseils du théosophe anglais ne sont pas suivis !)

Ce qui frappe – et choque un peu – dans cette classification, c’est son caractère vraiment par trop simpliste. Pour des êtres d’une aussi exceptionnelle qualité que des anges, on voudrait, semble-t-il, autre chose que ces humaines et même enfantines catégories. M. Hodson, à défaut de révélation, manque d’imagination. Son rituel ne prête pas moins à sourire.

Les cérémonies de prise de contact avec les anges consistent en une invocation matinale et un service vespéral d’actions de grâces. Le temple des anges, consacré par un prêtre local, sans distinction de confessions, mais personnellement sympathique à la doctrine, doit posséder un autel sur lequel on place des fleurs, des symboles religieux, un portrait ou une statue du fondateur de la religion (Bouddha chez les bouddhistes, Christ chez les Chrétiens, Mahomet chez les musulmans, etc.), de l’eau bénite, de l’encens et des cierges. Si tous ces accessoires font défaut, des fleurs fraîches suffisent. Les fidèles doivent être revêtus, sur du linge de corps blanc, des robes de couleur correspondant au groupe d’anges invoqués.
 

Pour les anges gardiens du foyer, robe rose et vert pâle.

Pour les anges guérisseurs, robe bleu saphir.

Pour les anges de la maternité, robe bleu de ciel.

Pour les anges de la force, robe blanche.

Pour les anges de la musique, robe blanche.

Pour les anges de la nature, robe vert pomme.

Pour les anges de la beauté et de l’art, robe jaune.
 

Je ne crois pas nécessaire de poursuivre l’exposé des cérémonies proposées par M. Hodson. La candeur de ce prophète est proprement désarmante. Si les anges de la beauté et de l’art ne sont favorables qu’à des adorateurs en péplum citron leur récitant vingt-cinq mauvais vers blancs anglais, on a évidemment tout lieu de désespérer des envois au Salon d’automne.

Il y avait pourtant quelque chose de fort joli à tenter, artistiquement et littérairement parlant, avec ce renouveau de tendresse pour ces êtres de poésie et de charme en lesquels l’angoisse et la tristesse humaines ont symbolisé leurs aspirations de sereine beauté et transposé le deuil des séparations prématurées.

Les fées jardinières de M. Gardner sont plus délicieuses que les anges de M. Hodson. Les unes et les autres, de toute façon, plaisent à la mentalité anglo-saxonne, éprise de merveilleux. Qu’on relise l’ouvrage d’Evens-Wentz sur le Culte des fées dans les contrées celtiques (H. Frowde, Oxford University Press). Qu’on se souvienne du poète Yeats, « consul général du pays des fées auprès de la République irlandaise » et des anthologies copieuses qu’on pourrait constituer avec tout ce que la féerie a inspiré aux écrivains anglais.

C’est un thème infiniment séduisant que les théosophes feraient mieux de ne point chercher à trop enfermer dans des formules et des théories toujours inférieures en grâce à la poésie dont l’enfance et même l’âge mûr, qui a le courage de ne point douter de tout, savent le parer.

Croyons que les fées, comme de grands papillons attendris, dansent dans un rayon de soleil devant d’innocentes petites Anglaises fabricantes de Christmas cards, au silencieux vallon de Cottingley.
 
 

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(René Puaux, « Lectures étrangères, » in Le Temps, trente-septième année, n° 24142, jeudi 22 septembre 1927)

 
 

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Les photographies illustrant les deux articles sont essentiellement extraites de l’ouvrage de Conan Doyle, The Coming of Fairies, London : Hodder & Stoughton, 1922.

 
 
 
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(Article original d’Arthur Conan Doyle, « Fairies Photographed, » paru dans le Strand Magazine, décembre 1920 ; il sera suivi d’un essai sur les fées, « The Evidence of Fairies, » avec deux nouvelles photographies, en mars 1921)

 
 
 

LES SOURCES DE LA MYSTIFICATION

 

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Il fallut attendre une interview avec Joe Cooper pour un article qui parut sous le titre : « Cottingley: At Last the Truth, » dans le magazine The Unexplained (n° 107, novembre 1982), pour qu’Elsie reconnaisse enfin que les photographies avaient été truquées. Frances possédait un exemplaire du Princess Mary’s Gift Book (London : Hodder & Stoughton, 1914) et les deux cousines avaient fabriqué et découpé des silhouettes de fées en carton, maintenues à l’aide d’épingles à cheveux, en prenant pour modèle une série d’illustrations de Claude Arthur Shepperson pour un poème d’Alfred Noyes, « A Spell for a Fairy, » (p. 101-104). Il est d’ailleurs amusant de remarquer, au passage, que le même recueil contenait également une nouvelle de Conan Doyle, « Bimbashi Joyce. »

Nous reproduisons ci-dessous les quatre pages du poème de Noyes avec les dessins de Shepperson. Si les trois premiers ne paraissent guère significatifs, le dernier aurait constitué en revanche la principale source d’inspiration d’Elsie et Frances pour la confection de leurs silhouettes féériques ; on le retrouve fréquemment sur le net, notamment dans l’article que consacre Wikipédia à l’affaire des fées de Cottingley. Il est d’ailleurs possible qu’elles aient utilisé d’autres gravures de livres pour enfants pour la réalisation de leurs petits personnages.

Pourtant, à la lecture du Princess Mary’s Gift Book, il y a une autre source d’inspiration, plus rarement mentionnée, sur laquelle il convient d’attirer l’attention. Précédant d’une dizaine de pages le poème d’Alfred Noyes, une charmante illustration contre-collée en couleurs, annonçant « A Spell for a Fairy, » – et toujours signée de Claude Arthur Shepperson, – est insérée face à la page 92. Elle semble avoir particulièrement inspiré nos deux faussaires dans la composition des délicieux « tableaux photographiques » mettant en scène leurs amies les fées.
 
 

MONSIEUR N

 
 
 
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SOURCE3
 
SOURCE4
 
SOURCE4 p117