« Il y a encore, à Thisne-la-Grande, beaucoup de gens qui ne croient pas aux revenants. Quand ils étaient petits, leurs parents leur ont inculqué des principes pleins de sagesse. Ils leur ont dit : « N’use point tes jours en billevesées ; ce que l’on ne voit pas n’existe pas ; ce qui ne rapporte rien n’est pas digne d’occuper un instant de notre vie ; ne te laisse jamais aller à comparer la fleur, sous prétexte qu’elle est belle et parfumée, avec la betterave qui fournit le sucre et nourrit la vache. »
Ce sont là des règles d’or, et ceux qui les ont suivies possèdent du bien au soleil.
Mais ils ne croient plus aux revenants ! Lorsque, par malheur, ils sont aux prises avec un esprit et qu’ils luttent, ignorant leur folie et leur présomption, et qu’ils s’épuisent et vont succomber, leurs pareils les regardent étonnés, ne comprennent pas et finissent par les désigner avec mystère et compassion, en portant leur index au milieu de leur front. »
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(Hubert Stiernet, La Girouette, 1906)