Nous ne croyons pas empiéter sur le domaine des sciences, à peine sur celui des faits divers, en rapportant une découverte qui vient d’être faite aux environs de Mulhouse. Nous devons avertir cependant les géologues que cette découverte leur causera une grande et joyeuse émotion, pour peu qu’ils veuillent y ajouter quelque foi. Voici ce que rapporte le Mülhauser Anzeiger : Deux habitants de la ville se promenaient auprès d’une source qui a récemment jailli dans la banlieue. Tout en causant, ils s’approchèrent du bord. Et ils virent avec stupeur paraître sur la surface des eaux une tête extraordinaire, aux yeux phosphorescents, et emmanchée sur un cou démesuré. Au bout d’une seconde, la tête plongea avec un sifflement épouvantable. La situation continentale de la ville y rendant extrêmement difficile la présence du grand serpent de mer, les personnages les plus compétents de la région ont conclu que l’hôte de la source était un plésiosaure… c’est-à-dire un saurien des mers secondaires. Peut-être ce dragon garde-t-il dans un palais de cristal une princesse blonde, coiffée d’algues et de perles. Mais c’est peu probable. Et nous devons avouer que cette hypothèse n’a aucun caractère scientifique. Quoi qu’il en soit, le plésiosaure de Mulhouse est déjà célèbre dans toute l’Alsace. Et il n’est pas de femme de tisserand qui ne se serve de lui pour effaroucher les marmots et les contraindre au silence. Depuis qu’on l’a découvert, tous les petits bonshommes blonds qui jargonnent du patois en mangeant des myrtilles sont devenus sages, obéissants, studieux, prompts à se rendre à l’école et exacts à en revenir directement. Ils pratiquent toutes les vertus de leur âge, car ils ont une peur terrible d’être mangés.
 
 

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(« Au Jour le jour, » in Journal des Débats politiques et littéraires, cent-treizième année, n° 45, vendredi 15 février 1901 ; entrefilet repris partiellement dans la rubrique « Échos de partout, » in Le Grand Écho du Nord et du Pas-de-Calais, quatre-vingt-troisième année, n° 51, mercredi 20 février 1901, puis dans Le Petit Troyen, journal quotidien de la démocratie de l’Est, vingt-et-unième année, n° 6609, jeudi 21 février 1901)